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Tafraout, au coeur de l'Anti-atlas
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6 juin 2008

Alerte aux séries noires des incendies à Tafraout

Alerte aux séries noires des incendies à Tafraout

Descente dans le brasier de Tizrkine

Hier vers 17 heures. Place de la mosquée, au village de Tizrkine. Les quelques vieillards en farniente taillent paisiblement bavettes. Ils plongent de temps à autre leurs regards vers les minces fumées en spirale que dégage au gré du vent l’immense verger collectif du village. Pas de doute : scène habituellement récurrente et bénigne.

Sauf que, quelque temps après, les voix affolées de femmes et enfants criant au feu se font entendre. Les crépitements des flammes dévorant la broussaille se font de plus en plus bruyants. Rapidement, les fumées s’épaississent et assombrent les lieux de leur opacité. La visibilité s’amoindrit. Le vent aidant, les pans de flammes sautèrent à grands bonds pour créer d’autres foyers de feu. En quelques instants, l’oasis est pour de bon en combustion ardente.

Tout le village est vite alerté. Jeunes, femmes et enfants se mobilisent en volontaires. Les autorités locales interpellées par un habitant par téléphone sont déjà là pour piloter la lutte contre les flammes. Dans l’attente de l’arrivée incertaine, du moins pas dans l’immédiat, des sapeurs pompiers de Tiznit, alertés. Tout ce beau monde s’affaire avec des moyens du bord dans une lutte improbable à gagner. Seaux et ustensiles similaires sont « perquisitionnés » et mis à contribution pour acheminer eau de la seule source du village. Les flammes semblent plus têtues et persistantes, sous l’effet d’un vent qui tisonne, à coup de petites bourrasques ininterrompues, le brasier. Ce combat a failli finir en eau de boudin.

N’était-ce l’approvisionnement à grand débit des  secouristes improvisés en eau soulevée à l’aide de la pompe électrique à partir du puits d’un notable, et la mise à profit du camion-citerne de la municipalité. Une providence salutaire ! Cet enfer a duré près de six heures d’affilée. Ce n’est que vers minuit que les flammes sont domptées. Une heure du matin, elles sont carrément maîtrisées. Les odeurs étouffantes du brûlé rendent les lieux irrespirables. Invivables. C’est à ce moment que les échos de ronronnements du véhicule des sapeurs pompiers en partance de Tiznit, loin de 150 km, emplissent les lieux. Abandonné par le vacarme assourdissant des habitants, éreintés à ne plus bouger un pied.

Demain, c’est l’heure de la comptabilisation des dégâts infligés. Une vingtaine de palmiers dattiers sont à déplorer. Etant complètement carbonisés. Autant d’arbres fruitiers cramés. Autant dire un couloir de 400m de long, et une bonne dizaine de plantations parties en fumée. Laissant un gros trou dans le ciel de cette oasis, le sol ombragé n’est jamais atteint par les rayons solaires. Et la cause de l’incendie ? Les renchérissements vont bon train. Mais s’accordent tous que son origine est humaine. Les supputations vont de l’éventuelle simple inadvertance des usufruitiers de ces vergers allumant le feu lors des travaux de ratissages réguliers de terrains exploitables, à l’action criminelle sous l’impulsion de l’alcool. Mais cette dernière demeure l’hypothèse la plus vraisemblable, étant avancée par la majorité des habitants. Le village compte une horde de jeunes désoeuvrés.

L’abondance dans les vergers de fruits telles dattes, figues… leur donne de mauvaises idées. Ces matières sont utilisées pour la fabrication de la gnole dans laquelle ces oisifs n’hésitent pas à noyer leurs ennuis. Mieux ! Le village est même désormais réputé pour être une destination marchande attirant les adeptes et accros de ces liqueurs dans les régions avoisinantes. Malheureusement, ce triste incident n’est pas un cas isolé dans la région. Ces dernières années, ils sont de plus en plus récurrents en cette même période. La mémoire des habitants ne s’est pas encore remise des séquelles laissées par les feux ayant dévasté de grandes superficies de leurs vergers. Le plus terrible incendie connu de la région est celui déclenché à l’autre oasis d’Aît Mansour relevant de la commune attenante d’Aflla Ighirà. Où plus de 4 km de champs arboricoles ont été complètement incinérés, faisant dans la foulée un mort parmi les villageois. Les habitants se rappelleront aussi longtemps l’incendie d’Imintizght, Tandilte, Assgawr dans la seule vallée d’Amelnes, ainsi que ceux nombreux de l’autre commune, Tahala… Et la liste n’est pas exhaustive !

Leur point commun : des habitants abandonnés à leur triste sort lors du calvaire de l’extinction. Des moyens de fortune. Et en prime l’arrivée tardive, une fois le mal irréparablement consommé, des services des sapeurs pompiers de Tiznit; autant dire à plus de deux heures de route uniquement pour accéder à la ville de Tafraout. Les dégâts occasionnés à la flore et à son écosystème sont à chaque fois incommensurables. Toutefois, l’incident en l’occurrence met de nouveau sur la sellette la problématique de la gestion des sinistres du genre dans la région. Et une question pertinente s’impose  : Pourquoi une antenne de proximité de ces services n’est-elle pas ouverte dans la région eu égard à la fréquence répétée de telles catastrophes ?

Nous avons posé la question à la direction des services pompiers de Tiznit dont relève la région. La réponse, soufflant curieusement le chaud et le froid, n’est pas rassurante. «Jusqu’à présent rien n’augure une éventuelle mise à contribution de l’antenne de Tafraout. Peut-être l’été courant, peut-être celui prochain… ! »,  tergiverse un responsable des services en question de Tiznit. C’est bizarrement la même réplique qui nous a été infligée l’année dernière !. Pourtant, un local est mis à notre disposition à Tafraout ; un staff de 24 personnes est prévu et sûrement les équipements afférents !, nous confirme la même source.

Un attentisme que seuls les exégètes en matière de  phraséologie  de l’Etat peuvent déchiffrer. Hélas !. Les habitants doivent encore prendre leur mal en patience et compter sur eux-mêmes en cas de tels sinistres qui sont suspendus sur la tête en épée de Damoclès ! A fortiori, même les circonstances prévalant actuellement sont loin d’être atténuantes quant à l’apparition, à Dieu ne plaise, d’autres incendies dans la région en cette période estivale. Les facteurs concourant à ces situations catastrophiques sont légion. En premier lieu, la rareté de l’eau à cause de la sécheresse qui affecte la région depuis de nombreux années. L’état sec d’une flore abondante dans les vallées et oasis qui constitue une proie potentielle à la propagation facile du feu en cas d’incendie.

Le manque est non des moindres de campagnes de sensibilisation des populations locales en la matière. A cela s’ajoute la migration massive que ne cesse de subir la région, vidant les villages de jeunes éventuels secouristes. Bref, cet état de fait met en cause de facto les programmes de gestion des catastrophes, que l’Etat se plait à ne sortir que lorsqu’il sera violemment interpellé par une calamité. Dans la foulée, tout dernièrement, une réunion est organisée au siège de la province entre les autorités locales, élus, gouverneur et autres services compétents.

Mais dans la région de Tiznit, ces « agitations cacophoniques  » ressemblent plus à des réunions de routine et de consommation administrative et médiatique, nous apprend un conseiller communal. L’arrière-pays de la ville de Tiznit regorge d’oasis, vallées et d’une vaste arganeraie…Il doit être considéré comme une zone à haut risque. Sa dotation par conséquent d’un vrai programme de prévention et de gestion des catastrophes et autres calamités, urge plus que jamais pour son salut. 

Par M IDRISS OUCHAGOUR   Sce: LIBERATION  Publié le06/06/2008

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